F
O
R
U
M
Voici les messages dans le sujet sélectionné.

Forum>The Doors>La mort de Jim Morrison
Nouveau message

UtilisateurMessage
Henode


16 Déc 2011, 18:53
Il est fourbe ce forum en fait, pleins de sections cachés, de boeuf bourguignons et de canadiens fous...

Fichtre
Citer
Sister Mid'nite


23 Aoû 2014, 2:53
Suite aux déclarations de Marianne Faithfull parues dans le magazine MOJO (un témoignage presque identique avait déjà été publié en mars 2011 dans Classic rock magazine), petits résumés non exhaustifs des versions sur la mort de Jim (dans le bon topic !)



1. Version officielle de Pamela Courson:

Voici les principaux extraits parus dans le deuxième livre d'Hervé Muller "Jim Morrison mort ou vif" publié en 1991:


Le 3 juillet à 9h25, les pompiers débarquent dans l'appartement rue Beautreillis. C'est Pamela qui les accueille.


Que s'est-il passé ?

Dans sa déposition à la police le 3 juillet à 15h40, durant laquelle Alain Ronay (un ami que Jim avait fait venir à Paris) sert d'interprète, Pamela déclare qu'elle ne se souvient pas du nom du médecin qui soignait Jim et qu'elle n'a pas les ordonnances. Elle continue en disant que le 2 juillet Jim est allé dîner seul à l'extérieur. Ensuite, ils sont allés ensemble voir le film "La vallée de la peur" au cinéma Action Lafayette. Ils sont rentrés à 1 heure du matin. Ils ont écouté de la musique jusque vers 2h30.

Il n'y a pas de pendule dans la chambre, mais elle pense qu'il était environ 3h30, lorsqu'elle a été réveillée par le bruit de la respiration de son ami. Elle l'a réveillé parce qu'elle avait l'impression qu'il étouffait. Elle a voulu appeler un médecin. Il a refusé et est allé prendre un bain chaud. Une fois dans la baignoire, il l'a appelé et lui a dit qu'il avait la nausée et voulait vomir. Elle lui a apporté un récipient couleur orange dans lequel il a vomi et dans lequel il y avait du sang. Il a vomi une deuxième fois que du sang puis une troisième fois des caillots de sang. A la fin, il a dit qu'il se sentait bizarre mais qu'il ne voulait pas de médecin. Il lui a dit d'aller se coucher. Rassurée c'est ce qu'elle a fait. Plus tard elle s'est réveillée vers 5h00-5h30 et est retournée dans la salle de bain. Son ami était toujours allongé dans la baignoire, la tête en arrière, les yeux fermés, un filet de sang sous ses narines. Elle l'a secoué et a essayé de le sortir de la baignoire sans y parvenir. Dans toutes ses déclarations officielles, Pamela indiquera que Jim est décédé à 5h00 - 5h30. C'est cette heure-là qui sera retenue par le médecin.

Vers 9h00, elle téléphone chez Agnès Varda. Alain Ronay répond. Il rapporte à Agnès Varda que Jim serait au plus mal, dans le coma semble-t-il. Agnès Varda alerte immédiatement les pompiers. Il est 9h10.

Alain et Agnès se rendent rue Beautreillis. A ce moment-là les pompiers ont déjà sorti le corps de la baignoire et tentent de le réanimer. En vain. Le lieutenant Alain Raisson annonce le décès aux personnes présentes. Détail important, il explique qu'à son arrivée, le corps était encore chaud et que si ils étaient intervenus 1 heure plus tôt (donc 8h15) ils auraient certainement pu le sauver.

Jim est déposé sur un lit et c'est là qu'Alain Ronay et Agnès Varda le voit pour la dernière fois. Dans son rapport, le lieutenant des pompiers précise que la baignoire était pleine d'eau légèrement rosée, que l'eau était tiède et le corps aussi, qu'il a sorti le corps et fait des massages cardiaques.

Dans la matinée, un premier médecin (dit "médecin des corps" et rattaché à un commissariat) se rend à l'appartement. Il examine très rapidement le corps et écoute les explications sur l'état de santé de Jim que lui donne Alain Ronay. Il repart très rapidement.

A 18h00, c'est un médecin légiste, le Dr Vassille, qui se présente à l'appartement. Il est présent pour déterminer si il y a eu un meurtre ou un suicide. Le médecin déclare que Jim est décédé d'une crise cardiaque, probablement provoqué par un caillot de sang dû à une infection pulmonaire. Il délivre le permis d'inhumer.

Interrogé des années plus tard alors qu'il s'est établi à Rio de Jainero, le lieutenant des pompiers Raisson confirme l'histoire de son arrivée à l'appartement avec une équipe de cinq pompiers:

"Le corps était chaud, donc l'équipe a essayé de le réanimer. Nous l'avons porté sur le lit pour faire un massage cardiaque," dit-il. "Nous avons essayé et laissé tomber. Le docteur était stupéfait quand on lui a dit que l'homme habillé d'une djellaba marocaine n'avait que 27 ans".


A côté de cette déclaration officielle, Pamela aurait livré une version officieuse le 3 juillet à Alain Ronay (lire son témoignage plus bas) et plus tard à Danny Sugerman à Los Angeles. Celui-ci en parle dans son livre Wonderland avenue et affirme que Pam lui a confié que Jim était mort accidentellement d’une overdose d’héroïne après avoir cru qu’il sniffait de la cocaïne…




2. Version Hervé Muller (journaliste au magazine français Best puis Rock & folk et connaissance de Jim et Pam lors de leur bref séjour à Paris):

Hervé Muller dans son livre "Jim Morrison au-delà des doors", bouquin par ailleurs excellent, est le premier a avoir mené une enquête de 1972 à 1978 sur la mort de Jim et a affirmé que la nuit fatale (du 2 au 3 juillet) Jim a été retrouvé au Rock'n'roll circus.

C'est aussi Hervé Muller, qui, à la demande de Jerry Hopkins, livra en 1974 sa version de la mort de Jim pour le bouquin "No one gets out here alive" traduit en français sous le titre "Personne ne sortira d'ici vivant".


Par hasard, Muller avait appelé le samedi matin 3 juillet vers midi pour prendre des nouvelles de Jim qu'il n'avait plus revu depuis le 11 juin et c'est Alain Ronay qui lui a répondu que Jim et Pam étaient absents.

Muller met en doute la version de Pamela parce que durant cette nuit du 2 au 3 juillet, au club "La Bulle" vers 5 h du matin, le DJ américain Cameron Watson aurait annoncé la mort de Jim alors que personne n'était censé être au courant en dehors de Pamela. Le DJ tenait l'information de 2 dealers qui travaillaient avec Jean de Breteuil. Ceux-ci affirmaient que l'artiste était décédé au Rock'n'roll circus. Le problème avec ce témoignage c'est que le mec a raconté 2 versions différentes. Dans le doc canal+ de 1991, il dit que dans la soirée des types lui ont demandé où trouver de l'héro pour Jim et dans le doc France 2 en 2006, il dit qu'il annonce la mort de Jim à 6 h du matin...


A partir de là, Muller fait des recherches et élabore son propre scénario:

Pour Muller, Jim s'est rendu au Rock'n'roll circus (peut-être avec Pamela ?) dans la nuit du 2 au 3 juillet.

(En 1971, le Rock'n'roll circus est fréquenté autant par les Parisiens que les Anglo-Saxons. Il peut accueillir entre 500 et 600 clients. Plusieurs groupes de rock y ont donné des concerts. Outre les amateurs de rock et les noctambules, le club était connu pour sa clientèle mêlant le milieu du show business et une clientèle interlope composée de junkies et de prostituées, celles-ci racolant dans les toilettes du sous-sol. A cette époque, les USA, et modérément la France, sont les principaux marchés d'une organisation clandestine corse connue sous le nom de French Connection qui raffine une héroïne particulièrement pure. La police surveille d'ailleurs plusieurs clubs parisiens dont le Rock'n'roll Circus.)

Aux USA, Jim ne consommait pas d'héroïne mais Pamela en usait occasionnellement sans être une toxico à proprement parler. A Paris, elle fréquentait une bande de junkies de bonne famille que Jim tolérait.

Cette nuit-là, un dealer grossiste répondant au nom de Michel, aurait été présent au Rock'n'roll circus. Il revendait aux petits dealers son stock d'héroïne préparée par la French Connection à Marseille. Un de ces petits dealers, surnommé "Le petit Robert", aurait été le contact de Pamela. Cette information parait étrange. Jean de Breteuil se vante d'être en lien direct avec la French Connection et de plus il est un ami de Pamela. Pourquoi Pamela passerait-elle par un petit dealer dans un club ? On sait que depuis son arrivée à Paris, Pamela a rencontré à de multiples reprises Breteuil et les occasions n'ont donc pas manqué pour qu'elle s'approvisionne en dope.

Ensuite, si Jim venait acheter de l'héroïne pour Pamela pourquoi aurait-il consommé cette drogue ?

Pour Muller, comme Jim essayait n'importe quoi pour peu qu'il en ait envie et qu'en plus il souffrait à cette époque-là d'une grave dépression, il est très possible qu'il sniffa de l'héroïne cette nuit-là dans le club.

Mais il n'y a aucune preuve qu'il l'ait fait.

Toujours selon Muller, retrouvé inanimé, Morrison aurait été évacué par l'Alcazar, un club voisin du Rock'n'roll circus et on aurait dit à la clientèle surprise par ce transport qu'il s'agissait d'un show sur le thème "La mort du Rock'n'roll !..." C'est la raison pour laquelle personne ne se serait informé plus en détail ! Muller reconnait que cet épisode surréaliste tiendrait plus de l'affabulation que de la vérité.

Arrivé à l'appartement, le corps aurait été déposé dans la baignoire afin de le réanimer. Au matin, Pamela téléphone à Agnès Varda.


C'est donc Hervé Muller le premier qui a diffusé "officiellement" la version du Rock'n'roll circus sans affirmé qu'il était réellement mort dans les toilettes de ce club. Il admet que la version Rock'n'roll circus contient beaucoup d'hypothèses mais qu'elle est une réponse aux rumeurs qui ont immédiatement suivies.

Lors de ses recherches (de 71 à 78), Muller voulait obtenir le témoignage d'Agnès Varda. Mais celle-ci n'a jamais voulu coopérer. Elle admet qu'il y a un mystère autour de la mort de Jim et qu'elle n'y est pas étrangère. "Evidemment je sais des choses que vos informateurs ne savent pas" admet-elle. Mais elle refuse d'en dire plus s'appuyant sur le fait que la témoin principale (Pamela) n'est plus là pour parler et elle est morte sans avoir voulu témoigner.

Personnellement, j'ai beaucoup de respect et d'admiration pour le travail d'Hervé Muller. Mais sa version ne tient absolument pas compte de certains témoignages tardifs de premier plan comme ceux d'Alain Ronay (lire plus bas) ou Marianne Faithfull. C'est la raison pour laquelle je suis très sceptique sur la véracité de son histoire.




3. Agnès Varda (cinéaste française et amie de Jim)

Comme expliqué plus haut, Agnès a toujours refusé de dévoiler tout ce qu'elle savait par respect de la vie privée de Jim et Pam. A ma connaissance, le seul témoignage où elle parle de ce drame, c'est dans Paris Match du 25 avril 1991. Un grand article est consacré au séjour parisien de Jim et Pamela et l'article reprend des extraits du témoignage d'Alain Ronay (que j'ai traduit dans son intégralité plus bas).

Voici ce que dit Agnès Varda dans Paris Match:

Un an (ou plus) après la mort de Jim Morrison, j'ai reçu plusieurs appels des USA. On me demandait si Jim était vraiment mort, si je l'avais vu mort, si c'était bien lui... car d'aucuns disaient qu'il était encore vivant. Je répondais "Il est mort" et je raccrochais. J'ai écrit volontairement d'aucuns au lieu de quelques-uns car ces questionneurs n'avaient aucune réalité, alors que j'avais réellement vu l'impressionnante image, le tableau de Jim mort dans son bain, entourés des pompiers que j'avais appelé. (En fait, Alain, l'ami de Jim dormait chez nous et un appel de Pam nous avait réveillés ce matin de juillet 1971. Il était à peu près 8 h ou plus. Elle avait dit à Alain: "Viens vite, je crois que Jim se meurt." J'avais cru bon de prévenir les pompiers avant de nous y rendre. Trop tard ils n'avaient pas pu le réanimer).

Je l'ai donc vu mort. J'ai vu la baignoire en entrant dans l'axe du corridor. La tête de Jim était à gauche, posée penchée sur le bord en émail blanc et l'eau sombre couvrait son corps comme un tissu. Un filet de sang avait séché en coulant de son nez, dessinant un trait oblique vers le coin de sa bouche. Je ne me suis pas approchée. J'étais impressionnée: je sais qu'Alain et lui avaient vu peu avant un spectacle de Bob Wilson. Alain m'avait raconté une scène avec un homme immobile couché dans une baignoire comme le cadavre de Marat assassiné. C'est plus tard que je me suis rappelée ce récit en repensant à ce que j'avais vu, en doutant de ce que j'avais vu.

Des histoires ont circulé, des rumeurs circulent encore, chacun y va de son enquête. Jim serait tombé dans le coma dans une boîte ou dans la rue et aurait été ramené chez lui et mis au bain comme d'autres mis au lit. Moi je ne sais que ce que nous a dit Pam: je la connaissais à peine. Elle a parlé avec conviction de la soirée qu'ils avaient passée et des malaises de Jim décidant de prendre un bain au milieu de la nuit. Alain disait que Jim était fantasque et aussi qu'il avait eu des prémonitions et des moments de panique. De plus, il avait eu de longues crises de hoquet, comme un moteur qui cliquette avant de tomber en panne. Je pensais à toute autre chose, à ces naissances organisées par le Dr. Leboyer où la fin de l'accouchement se passe dans la pénombre afin que l'enfant qui vient du noir ne soit pas traumatisé par la lumière. Le nouveau-né est immédiatement immergé dans un bain pour se sentir encore un peu dans les eaux sombres de sa mère. On allumait des chandelles. Existe-t-il une expérience inverse ? Jim, le poète des Doors, a-t-il cherché, en rêvant en arrière, à rester un moment dans la nuit et dans l'eau avant d'entrer dans les ténèbres sèches où l'on ne rêve plus ?




4. Version Sam Bernett (gérant du Rock'n'roll circus):

En 1971, Bernett était un jeune gérant - animateur au Rock'n'roll circus.

Depuis quelques années, il écrit des livres sur cette période et dans l'un d'eux, il raconte ce qu'il aurait vu. Je résume le passage de son livre:

Cette nuit-là (du 2 au 3 juillet), Jim serait venu au club vers minuit. Bernett lui aurait servi une vodka. Jim serait allé discuter avec deux dealers travaillant pour Jean de Breteuil. Depuis 2 jours Jim se serait mis à sniffer de l'héroïne. Après avoir discuté longuement avec les deux dealers, Jim serait allé aux toilettes, certainement, comme le suppose Bernett, pour tester la marchandise que lui avait refiler les deux dealers. A 2h30, une employée du club qui s'occupait des vestiaires vient dire à Bernett qu'elle n'arrive pas à ouvrir une porte des toilettes qui est fermée depuis 20 minutes. Bernett va frapper à la porte et personne ne répond. Il demande à un videur de venir défoncer la porte et c'est là qu'il découvre Jim: "Son visage est gris, les yeux fermés, il a du sang sous son nez et une bave blanchâtre comme de l'écume autour de la bouche ouverte et DANS LA BARBE. Jim ne respire pas."

Un médecin présent dans le club vient aussitôt le diagnostiquer. Son verdict : crise cardiaque suite à une overdose. Les 2 dealers transportent le corps dans une voiture et l'emmènent à son appartement.

Bernett se dit qu'il aurait quand même pu appeler les pompiers. Mais peu après le départ "du convoi funèbre", quelqu'un de l'Alcazar vient lui dire que comme Morrison est évacué, le club n'a désormais plus aucune responsabilité sur la suite des évènements ni d'ailleurs sur ce qui s'est passé dans les toilettes... Convaincu, Bernett ne fera rien. Business must go on...


Ce récit de Sam Bernett, d'apparence tout à fait crédible, présente une erreur importante qui remet en doute la véracité de son témoignage: il prétend que Jim était barbu alors qu'il ne l'était plus depuis plusieurs semaines. (une photo prise par Alain Ronay le 28 juin le montre d'ailleurs rasé). Ce n'est pas un détail anecdotique. La barbe que Jim portait à son arrivée en France est très fournie et change complètement son visage. On ne peut pas l'ignorer. De plus pour quelqu'un qui prétend discuter pratiquement tous les soirs avec Morrison au Rock'n'roll circus, c'est impossible de ne pas se souvenir de l'aspect de Jim. 40 ans après Bernett se souvient de l'heure à laquelle il aurait découvert le corps mais il a oublié le visage de Jim ! Cela se passe de commentaires.

Certaines personnes ont avancé des explications concernant cette version de la mort au Rock'n'roll Circus. Deux scénarios sont proposés. Le premier scénario part du principe que Jim était bien dans le club cette nuit-là, mais qu'il aurait eu un malaise comme il en avait déjà eu les semaines auparavant. La drogue n'aurait rien à voir avec cette perte de connaissance. Le deuxième scénario explique qu'effectivement il y a bel et bien une personne qui est morte dans les toilettes du Rock'n'roll Circus mais ce n'était pas Jim Morrison. Ceci expliquerait la barbe que portait la victime. Bernett se serait ensuite basé sur ce décès par overdose en affirmant que c'était Morrison qui était dans les toilettes.

Sam Bernett affirme que durant 40 ans il a porté la douleur de la mort de cet ami. Il veut aujourd'hui que la vérité soit rendue publique. Je souris.

D'abord la version que Bernett étale dans son livre est déjà connu depuis 1973 à travers le livre d'Hervé Muller. Ensuite, me basant sur le témoignage de Gilles Yéprémian, on apprend qu'une nuit Jim s'est fait éjecté du Rock'n'roll circus par des videurs comme un vulgaire alcoolique. Cela me semble incompatible avec l'amitié que prétend avoir entretenu Bernett avec Jim. A l'inverse, Gilles Yéprémian, qui ne le connaissait pas personnellement, et le croisait pour la première fois, l'a pris en charge et l'a amené chez Hervé Muller pour qu'il y passe la nuit en sécurité.

On le voit, le récit de Bernett est douteux et celui-ci a changé plusieurs fois de version par rapport à cette tragédie. Ainsi dans un article du magazine français Actuel paru en novembre 1990, il est mentionné que Bernett affirme ne pas avoir vu le chanteur cette nuit-là. Le 26 avril 1991, à l’occasion de la sortie du film The doors d’Oliver Stone, le journal télévisé de France 3 interviewe Sam Bernett. Il raconte : « Une des filles qui s’occupait du vestiaire est venue me dire qu’il y avait un problème dans les toilettes. Qu’il y ait des types effondrés dans les toilettes c’était rarissime, qu’il y ait des types coincés dans les toilettes c’était pas extraordinaire. J’ai dit : Bon... C’est le lendemain que j’ai appris la mort de Jim Morrison… »

Enfin, dernier point qui soulève des doutes sur le fait que Jim serait venu chercher de l'héroïne au Rock'n'roll circus et qu'il l'aurait sniffé dans les toilettes. La question qui se pose: pourquoi Jim aurait-il acheté à des intermédiaires, qui plus est dans un club (avec les risques que cela comportent), ce que Pamela pouvait acheter directement à de Breteuil en toute discrétion ?

Ce n'est pas inutile je pense de resituer dans le temps ce séjour parisien. Jim a vécu en Europe moins de 4 mois. Si l'on déduit tous les voyages qu'il a fait (Londres, Espagne, Maroc, Corse) il est resté à Paris environ 9 semaines. Alors je veux bien croire que Jim était un pilier de bar du Rock'n'roll Circus mais on sait qu'il n'y était pas tous les soirs. En considérant que Jim vienne dans le club 1 soir sur 2, il est venu au grand maximum 30 fois.

Agnès Varda n'accorde aucun crédit à Bernett. "Je n'ai jamais lu son livre mais je sais que ce qu'il dit est idiot. J'ai vu Jim Morrison quelques jours avant sa mort et il avait l’air mal en point. Il n'était pas en forme, ceci je m'en souviens. Pamela m'a appelé le matin et m'a dit que Jim était au plus mal. Le jour avant, Alain (Ronay) m'avait déjà dit qu'il trouvait que Jim n'allait pas bien. Mais je ne suis pas celle qui tenait sa main… Ne me citez pas par rapport à un livre stupide !"

De son côté Hervé Muller porte un regard très critique sur Sam Bernett "qui clame des dizaines d’années plus tard, qu’il a bien connu Jim et écrit un livre ridicule sur lui !» Il rajoute: «Bernett n’est d’ailleurs pas le seul à s’être souvenu très tardivement avoir "bien connu" Jim. Le journaliste François Jouffa a carrément repris et adapté l’histoire de Gilles Yepremian à son propre compte !»




5. Version Patrick Chauvel (photographe, DJ et barman au Rock'n'roll circus):

En 71, Patrick Chauvel a 21 ans. Il est reporter de guerre et couvre le conflit du Viet-nam. Il rentre de temps en temps en France et vient travailler comme barman et DJ au Rock'n'roll circus pour se faire du fric. C'est là qu'il rencontre Morrison.

Chauvel prétend qu'il était au Rock'n'roll Circus la nuit du 2 au 3 juillet.

Comme Bernett, il a raconté plusieurs versions très différentes.

Chauvel raconte beaucoup de choses sur les passages de Jim au Rock’n’roll circus. Il affirme que Jim se serait lié d'amitié avec son meilleur ami, un soldat apache métis déserteur du Viet-nam du nom de Sky Eyes. Morrison discute avec ce déserteur de la culture amérindienne et de la vie des soldats américains au Viet-nam. Il veut même écrire un livre sur lui. Jim parle aussi avec Patrick Chauvel de la guerre et aussi de lui-même. Il lui avoue qu'il veut abandonner le rock et se consacrer à la littérature.

Chauvel prétend que Morrison lui aurait dit qu'il ne se reconnaissait plus dans ses fans qu'ils trouvaient abrutis (le fameux You're all a bunch of slaves du concert de Miami ?)

Plus étonnant il affirme que Morrison lui a dit que c'est sa musique qui avait abruti ses fans ! Encore plus incroyable, il affirme que Morrison voulait s'engager comme soldat au Viet-nam !!! Faut-il comprendre cela comme de l'humour noir autour d'une bouteille de scotch ?

Dans une interview télévisée, il confirme la version de la mort dans les toilettes du Rock’n’roll circus. Il n'apporte pas de nouveaux détails mais contrairement à Sam Bernett, il affirme que ce sont des employés du club et non pas les dealers qui ont évacué Jim et l'ont ramené chez lui.

Pour quelqu'un qui affirme avoir discuté régulièrement avec Jim, je trouve personnellement que ce témoignage est particulièrement flou (lorsque le journaliste lui demande des précisions, il insinue que Jim se serait piqué alors que le médecin n'a découvert aucune trace de piqûre).

Cette version donne l'impression que Chauvel veut appuyer la version de son ami Bernett et démontrer qu'il était un pote de Morrison à Paris.


Dans le magazine Classic rock de novembre 2014, on découvre un autre témoignage de Chauvel. Il n'est plus question de drogue. « Il n’avait pas besoin d’acheter de la drogue ici. Je ne l’ai jamais vu prendre de la drogue. Il était alcoolique, assez émotif. Il pouvait être silencieux et tout à coup se lever et parler très fort. On voyait dans ses yeux qu’il avait des choses qu’il retenait en lui. Ca se voyait dans son regard. Il en avait marre. Il n’était pas à la bonne place. »

Chauvel se souvient que Jim était souvent accompagné d’une jeune femme blonde, qui n’était pas Pamela. Ils prenaient des photos ensemble, Jim était assis sur un canapé. (Cette femme était certainement Robin Wertle, 19 ans, une canadienne parfaitement bilingue qui travaillait comme secrétaire pour Jim depuis le début juin. Elle a aidé Jim à mettre de l'ordre dans ses écrits et ses papiers administratifs et après le 3 juillet elle a aidé Alain Ronay dans les démarches pour organiser l'enterrement. Elle était présente au Père-Lachaise. Puis elle a disparu et personne n'a retrouvé sa trace...)

Chauvel termine en décrivant l’atmosphère de l’époque et du club. « Il y avait beaucoup de drogues et de liberté sexuelle, de jalousie et de tension. Dans le club se croisaient la pègre et les flics. Il y a eu beaucoup de castagnes à l’intérieur et à l’extérieur. Il y a même eu des échanges de coup de feu devant le club. Moi-même je portais avec moi un long couteau. Dans ce quartier il y avait 3 clubs « très chauds » : Le Circus/Alcazar, La Bulle et le Sherwood. »




6. Version Nicole Gosselin (cliente du Rock'n'roll circus):

Elle affirme qu'elle était présente cette nuit-là au Rock'n'roll circus. Elle aurait vu Jim dans les toilettes ouvertes. Selon elle, il s'est affaissé le dos contre le mur. Elle ne l'a pas reconnu à ce moment-là. Elle a vu ensuite des personnes « habillées comme des bourgeois » précise-t-elle, dont une femme, venir chercher le corps visiblement déjà mort lorsque le taxi est arrivé. Elle connaît même le dealer qui lui a avoué par la suite lui avoir vendu la dope.

Est-ce que son pote dealer est le même que celui qui parle à Zouzou ?

Son témoignage est troublant parce que Nicole Gosselin est à l'époque une hippie et qu'elle fréquente tous les lieux branchés de la vie nocturne parisienne. Elle connait donc le Rock'n'roll circus et il est tout à fait concevable qu'elle ait été présente dans la nuit du 2 au 3 juillet. Son récit est détaillé ce qui lui donne de la crédibilité. Elle ne parle pas d'un Jim barbu.

Cependant quand elle dit que des hommes en costard-cravate accompagnés d'une femme sont venus chercher Jim pour l'emmener, on se met sérieusement à douter. Qui aurait pris le risque d'évacuer le corps d'une personne décédée dans un club ?

Cette dernière affirmation rend son récit suspect.




7. Version Zouzou (actrice et mannequin française et vague connaissance de Jim):

Cette actrice française très en vogue dans les années 60 et 70, compagne de Brian Jones et amie de Elisabeth Larivière chez qui logent Jim et Pam, n'était pas présente au Rock'n'roll Circus cette nuit-là.
Elle affirme qu'un dealer lui a dit qu'il avait vendu une dose d'héroïne à Morrison et que celui-ci était mort. Il rajoute qu'il espère que ce n'est pas sa dope qui a tué Morrison.

Zouzou a croisé quelques fois Jim et Pam mais elle n'est pas une amie intime du couple. Au début des années 70, elle est elle-même toxicomane. Ils se croisent parfois sur la terrasse d'un café et Zouzou dira que Pam demandait à Jim de l'argent pour, à son avis, aller s'acheter de la came.

Elle dit de Jim: "Morrison aurait dû aller beaucoup plus haut s’il n’avait décidé de tout foutre en l’air, à commencer par lui-même. Je l’avais vu à la Roundhouse à Londres et il était extraordinaire. Quand on dit que Jagger était sexy, fallait voir Morrison à ce moment-là ! Une vraie beauté sur scène. Un chat. On s’est recroisé à Paris trois semaines avant sa mort. Mais ce n’était plus le même. Il n’avait plus de cou, il était bouffi, presque pathétique…"



Zouzou fréquente les mêmes milieux que Morrison ce qui pourrait donner du crédit à ce qu'elle dit mais son récit repose sur un témoignage trop vague pour être pris au sérieux.




8. Version de Roger Steffens

En 1986, John Densmore participe à une émission radio sur Public broadcasting. L'animateur est Roger Steffens.

Voici ce que John dit dans son livre « Riders on the storm ».

A un moment, Roger Steffens dit:

«Abordons une question cruciale dont j’ai une partie de la réponse. Ca m’a choqué en lisant la biographie « No one gets out here alive » de découvrir à la page 381 « l’année suivant la mort présumée de Jim Morrison » … Je trouve que c’est blessant pour les gens de suggérer que Jim est encore vivant, parce que je connais les personnes qui ont trouvé son corps.

L’une était Marianne Faithfull et je suis surpris qu’elle n’en parle pas en public.

Pour faire court, je vivais à Marrakech à cette époque. Un homme qui est mentionné plusieurs fois dans la biographie, un comte français, Jean de Breteuil était un amant de Pamela Courson et ils se sont retrouvés tous ensemble à Paris.

Pamela a téléphoné à Jean et Marianne et a dit : « Jim est dans la salle de bain, la porte est fermée à clé, je n’arrive pas à le faire sortir, pouvez-vous venir le plus rapidement possible ? »

Ce que Jean et Marianne m’ont raconté 2 jours plus tard c’est qu’ils avaient enfoncé la porte et trouvé Jim mort dans la baignoire. Ils sont partis en avion pour Marrakech, où je vivais, et ils m’ont raconté l’histoire et ils tremblaient encore en la racontant. Je n’ai aucun doute sur la véracité de ce qu’ils m’ont dit.»




9. Version Stephen Davis (biographe de Morrison):

Stephen Davis reprend plusieurs éléments des témoignages de Pamela, d'Alain Ronay et de Jean de Breteuil (via Roger Steffens). Ce sont les 3 personnes dont on est certain qu’elles ont été en lien avec Jim le dernier jour.

Durant tout le mois de juin, Alain Ronay habite dans l'appartement avec Jim. Pamela est partie habiter dans un appartement que possède la famille Breteuil à Paris. Le 29 juin, Pamela revient habiter avec Jim rue Beautreillis et Alain Ronay part vivre chez Agnès Varda qui travaille à ce moment-là sur le script du Dernier tango à Paris avec le cinéaste italien Bernardo Bertollucci. Ronay confie à Varda qu'il est préoccupé par la dynamique très négative dans laquelle se trouve le couple Jim et Pam.

Le 1 juillet, Jim dort toute la journée dans son appartement. A 20.00, il sort avec Pamela pour dîner au Vin des Pyrénées. Il se dispute très violemment avec Pam dans le restaurant et rentre à l'appartement. Il ressort seul vers minuit pour aller dans un bistrot, le Mazet. Une photo de lui dans ce bistrot avec un fan américain existe.

Le matin du 2 juillet, Ronay se rend à l'appartement. Il trouve Jim déprimé avec une vilaine toux et les mains qui tremblent. Il passe la journée ensemble. Ils se promènent, discutent et boivent des verres. Ronay constate que Jim est très angoissé. En fin de journée, il le quitte et prend le métro parce qu'il a un rendez-vous. Morrison le supplie de rester avec lui…

Ensuite Jim et Pam seraient allés voir le film Le salaire de la peur et auraient dîner au restaurant. De retour dans leur appartement de la rue Beautreillis vers 1 heure du matin, ils écoutent de la musique et regardent des films projetés contre un mur du salon. Jim a commencé à boire du whisky et Pamela sniffe de l’héroïne achetée à Jean de Breteuil, puis Jim se met aussi à sniffer.

(Une version plus détaillée (qui n'apparait pas dans le livre de Stephen Davis) décrit ce qui se serait passé dans l'appartement. Après avoir regardé les films et dansé, Pamela sniffe de l'héroïne. Jim la surprend et se met dans une colère noire. Pour se disculper, Pamela tente de lui faire croire que la poudre est de la cocaïne ce qui ne les empêche pas de se battre dans le hall. Finalement Jim sniffe à son tour... (La confusion que Jim ferait sur la nature de la poudre est surprenante. En effet l'héroïne est brune alors que la cocaïne est blanche). L'ivresse de Jim, une obscurité presque complète (le salon était éclairé par des chandelles pour permettre la projection des films) ont-elles troublé la lucidité de Morrison à ce moment-là ?)

Un témoignage important à mon avis et qui est rarement mentionné, est celui d'une voisine (ce n'est pas Chastagnol). Celle-ci racontera à Elisabeth Larivière (la femme qui sous-louait l'appartement à Jim et Pam) avoir été réveillée cette nuit-là par un énorme tapage et avoir vu "Monsieur Douglas" nu hurlant dans la cage d'escalier.

Vers 3 heures du matin, le couple va se coucher. Pamela est réveillée par les râles de Jim qui semble s'étouffer. Inquiète, elle le réveille. Jim se lève, va dans la salle de bain et se coule un bain. Quelques instants plus tard, elle entend Jim vomir et elle va dans la salle de bain avec un récipient. Jim continue de vomir dans le récipient puis crache du sang. Malgré tout, il rassure Pamela qui retourne se coucher. Plus tard, elle entend Jim lui dire "Pam , tu es là ?" Elle se lève à nouveau et se rend à la salle de bain. Mais la porte est fermée à clé.

Elle téléphone à Jean de Breteuil, pour lui demander de l'aide. Celui-ci arrive dans l'appartement rue Beautreillis, et parvient à ouvrir la porte de la salle de bain. Là il découvre Jim inanimé dans la baignoire. Breteuil est choqué.

Que fait-il après ? Nous n'avons aucun témoignage.

Dans cette succession d'événements, il devient plausible qu'en quittant la rue Beautreillis une première fois, Breteuil avertisse ses dealers. Ceci expliquerait pourquoi un ou deux dealers sont au courant de la nouvelle déjà dans la nuit.

A 9.30, Jim est découvert dans sa baignoire par les pompiers, avec des hématomes sur le corps. Pensant qu'il souffre d'une hémorragie interne, ils essayent de le réanimer, en vain.

Une scène pas banale se serait déroulée plus tard dans la matinée. Alors que les pompiers, Agnès et Pam sont dans l'appartement, Alain Ronay, qui venait de s'acheter des cigarettes, croise 2 hommes qui le suivent jusqu'à l'appartement. Ils se présentent sous le nom de Jean et Jean-Louis et demandent à voir Pamela. Alain refuse et Jean lui répond que Pamela l'avait appelé et qu'il était au courant de tout. Lorsqu'Agnès se présente, Breteuil lui explique qu'il avait vécu 6 mois avec Pamela et que celle-ci voulait le voir. Pamela fait entrer Breteuil dans la chambre où séjournait Ronay. Ils discutent ensemble jusqu'à ce que Ronay les préviennent de l'arrivée de la police. Breteuil s'en alla en proposant à Pamela de venir s'installer dans une des propriétés de la famille Breteuil. De son côté Agnès proposait l'hospitalité pour la nuit à Pamela, le temps que tout soit fini.


Ce récit des événements présente à mon avis plusieurs points très intéressants.

C'est Breteuil que Pamela appelle en premier. A ce moment-là, Pamela ne téléphone pas à Alain Ronay qui logeait chez Agnès Varda. Pourtant elle a confiance en Ronay puisqu'elle lui confiera avoir sniffée de l'héroïne avec Jim. Mais elle contacte Breteuil parce qu'elle estime que la "crise" dans laquelle se trouve Jim est dû à la drogue et que Breteuil avec sa longue expérience de dealer-toxico est plus capable de gérer cette situation. Breteuil vient l'aider mais repart ... sans avoir téléphoné aux pompiers !... Pourtant il est français et sait à qui il doit s'adresser en pareille situation. S'il ne le fait pas c'est parce qu'il est persuadé que l'état dans lequel se trouve Jim est directement lié à l'héroïne qu'il a vendue à Pamela.

A noter que dans le récit de Stephen Davis, Jim sniffe de l’héroïne volontairement (tel que Ronay en témoigne).




10. Version Marianne Faithfull (chanteuse pop, comédienne, actrice et amante du comte (ou marquis ?) français Jean de Breteuil):

Marianne Faithfull et Mick Jagger se sépare en 1970 et elle perd la garde de son enfant. Elle arrête sa carrière artistique et devient accro à l'héroïne. Elle vit en SDF dans les rues du quartier de Soho à Londres jusqu'au moment où elle commence une liaison avec Jean de Breteuil qui est également l'amant de Talitha Getty. Celle-ci mourra d'une overdose le 12 juillet. Dans son autobiographie parue en 2000 Faithfull dira que Jean est le mec le plus horrible qu’elle a rencontré. « Je me suis mis avec lui uniquement pour la drogue et le sexe et lui était avec moi parce que j'avais été la compagne de Mick Jagger ... »

Breteuil passe beaucoup de temps à Villefranche-sur-Merque sur la Côte d'Azur dans la villa Nellcôte, fournissant de l'héroïne thaïlandaise cachée dans des poudriers de femme à Keith Richards qui vit avec Anita Pallenberg et leur enfant.

Il aurait connu Pamela déjà à Los Angeles où il s'était inscrit à l'UCLA à la fin des années 60. C'est lui qui aurait entraîné Pamela à consommer de l'héroïne. A Los Angeles, il est arrêté pour trafic d'opium. Son fournisseur était un chauffeur marocain qui travaillait au consulat français à Los Angeles. De retour en Europe, il fournit en héroïne beaucoup de stars de l'époque, aussi bien anglo-saxonnes que françaises.

Breteuil n'a évidemment jamais parlé publiquement de ce qu'il avait fait cette nuit-là. Ce qu'il aurait fait nous est raconté par son amante Marianne Faithfull et également Roger Steffens. La version de Roger Steffens et Faithfull se rejoignent mais Steffens donne plus de détails sur ce qui se serait passé dans l'appartement rue Beautreillis et il affirme que Breteuil et Faithfull sont venus ensemble. Faithfull affirme que seul Breteuil s'est rendu à Beautreillis. Cela n'a pas beaucoup d'importance sur le déroulement des faits. On peut imaginer que Faithfull veut éviter d'être mêlée de trop près à cette tragédie. De toute façon ce n'est pas elle qui dealait.

Le récit de Marianne Faithfull n'est pas très détaillé mais il confirme le rôle de dealer joué par Jean de Breteuil.

Le 1 juillet 1971, Breteuil et Faithfull arrivent à Paris et logent à L'Hôtel, 13 rue des Beaux-Arts où Jim et Pam avaient logé quelques semaines auparavant.

Faithfull raconte que durant la nuit, Pamela téléphone à Breteuil pour qu'il vienne chez elle. Faithfull aurait demandé à Breteuil de pouvoir l'accompagner parce qu'elle aimerait faire la connaissance de Jim Morrison. Breteuil refuse et lui dit qu'il sera de retour dans 2 heures et qu'il lui expliquera ce qui se passe plus tard.

Il revient le matin et réveille Marianne Faithfull qui est sous l'effet de Tuinals. Très nerveux, Breteuil se met à la frapper sans raison. Ironiquement, elle lui demande s'il va lui expliquer pourquoi il est de si bonne humeur !

Prépare-toi à partir pour le Maroc ! lui répond-il.
Très drôle ! nous venons à peine d'arriver !
J'aimerais te présenter à ma mère.
Mais que s'est-il passé ? Non... ne me dis pas que...
Ferme-la ! Oui, c'est la merde, c'est vraiment la merde !!!

Faithfull comprend que son amant est mêlé à une affaire de drogue qui s'est mal terminé.

Si l'on se réfère au témoignage de Roger Steffens, quand Breteuil arrive à l'appartement rue Beautreillis, Jim est enfermé dans la salle de bain. Et donc Breteuil ne vient pas dealer à ce moment.

Pour moi, son histoire tient la route. Voilà pourquoi.

Premièrement, la version de Faithfull confirme la version que Steffens raconte en 1986 et qui est la version racontée à Marrakech par Jean de Breteuil et elle-même 2 jours après le drame.

Deuxièmement, le 3 juillet en fin de journée, Breteuil et Faithfull s'enfuient de Paris pour se réfugier à Marrakech au Maroc où réside la mère de Jean de Breteuil. Il n'y a aucune raison de fuir si ce n'est qu'on a peur d'être arrêté. La coïncidence veut que ce soit précisément le jour du décès de Jim.


Sur plusieurs sites, forums et blogs anglophones, il est indiqué que Marianne Faithfull raconte qu'elle est venue a l'appartement avec Breteuil, qu'ils ont découvert Jim mort dans la baignoire après qu'il fut ramené du Rock'n'roll Circus. Cela laisse supposé que Faithfull confirme que Jim était au Rock'n'roll Circus. Or c'est faux. Faithfull a répété plusieurs fois qu'elle ne connaissait pas cette histoire du Rock'n'roll Circus...



11. Version Tere Tereba

Tere Tereba était une amie de Jim et Pamela à Los Angeles. Elle dessinait des vêtements et a travaillé pour Themis, le magasin de fringues que Jim avait offert à Pamela. Elle est la jeune femme qui apparait sur la série de photos prises dans la boutique Themis par la photographe Raeanne Rubenstein en 1969.

En 1971, elle leur a rendu visite à Paris. Voici son témoignage:

À Paris, les deux m'ont dit, individuellement, beaucoup de choses.

Jim m'a dit, entre autre, qu'il était suivi par un médecin. Il était abattu quand il m'a dit qu'il avait des problèmes pulmonaires et qu'il toussait parfois du sang mais il m'a aussi dit qu'il avait de nombreux et grands projets pour l'avenir.

Pamela m’a dit que pour la première fois dans la vie de Jim, des choses nouvelles et dangereuses se prolongeaient. Pamela Courson, que j’imaginais avoir pris soin de Jim, a peut-être été celle qui a causé son décès. Jim avait confiance en Pam. Je ne crois pas que Pam ait planifié la mort de Jim. Mais elle est en partie responsable parce que sa relation avec Jim n’était pas son principal souci.

Naïvement, j'ai pensé qu'ils s’aimaient. Jim aurait dû être fort et ne pas être toujours d'accord avec elle...


Après la mort de Jim, je n'ai jamais reparlé à Pam. Par hasard, je l'ai croisée, sans lui parler, de nombreuses fois. Elle est morte dans un appartement sur N. Sycamore Avenue à côté de l’immeuble où je vivais à l'époque. Une nuit, une ambulance m'a réveillée. Plus tard, en lisant le journal, j’ai compris que l’ambulance avait emporté le corps de Pamela Courson. Elle a fait une overdose par injection, 3 ans après Jim. Il n'y avait aucun mystère entourant sa mort.




12. En 2011, le dernier amant de Pamela Courson, Randy Ralston, a publié sur son compte Facebook des confidences que Pamela lui aurait faites en 1973. Ici les accusations de meurtre sont sans détours mais les dialogues rapportés ne peuvent pas réellement être recoupés avec d'autres témoignages.

Il semble que ce message ait disparu du compte Facebook. Je le publie quand même, mais je ne suis pas convaincue par cette version même si la personnalité de Pam décrite par Randy se retrouve dans d'autres témoignages.
Le mobile du meurtre ne me semble pas très convaincant (Jim aurait décidé de quitter Pamela) parce que Jim s'était déjà retrouvé dans une situation de détresse similaire quelques semaines plus tôt et Pamela avait alors appelé en urgence un médecin.

J'ai traduit l'essentiel


Randy: - Pam, quels ont été les derniers mots de Jim ?

Pam: - Il bredouillait "ce n'est que du néant, rien ... avec un feu autour..."

Pam: - Je lui ai dit en haussant les épaules "Il n'y rien du tout ?" et il a dit: "Nous grandissons indéfiniment..."

J'ai dit: "Jim, je t'en supplie !" et il a répondu : "Comment se passe l'overdose ?"

J'ai alors crié "Espèce de déviant !"

Jim a dit "Je me sens un peu déprimé. Je dois me lever."

Pam : - Non !

Jim: - Pam, j'ai dû mal à respirer ! Aide-moi à sortir de la baignoire !

Pam: - Vu la situation et comme tu ne me baiseras pas quand je l'ordonnerai, je vais te repousser dans la baignoire !

Jim: - Je ne veux pas que tu...

Pam : - James Douglas, je vérifie ton énergie... tes points de pression. Il a gémi : "Qu'est-ce que tu fais ? Épargne-moi ! "

Pam: - Après je suis allée me coucher et le matin, j'ai trouvé Jim dans le bain et sa peau était bleue ! Jim était bleu comme Krishna !"


Ralston poursuit:

Un jour, Pam est entrée dans mon appartement et après avoir bavardé un moment, elle s'est complètement effondrée et s'est mise à pleurer de façon hystérique.

Puis elle a dit : "J'ai tué Jim..."

C'était comme si j'étais un prêtre et qu'elle devait se confesser.

J'ai demandé : "Prémédité...Pam ?"

Pam: "Oui"



Pour conclure, Randy Ralston dépeint une Pamela habitée par "la force obscure":

"Pamela savait que je la défendrais toujours et que je ne lui ferais jamais de mal mais j'ai vu comment elle procédait quand elle voulait un homme. Elle commençait d'abord à le harceler et à éliminer vicieusement toutes les autres femmes autour de lui. Une fois qu'elle l'avait maîtrisé, elle le réduisait en poussière. Elle avait cette étrange torture intérieure. J'ai désigné par le mot "la doorture" ce qu'elle faisait subir parfois à Jim. Quand elle voulait qu'il la baise et que Jim n'arrivait pas à bander, elle devenait folle et sortait en ville pour se venger de lui ...!

A Paris, il lui a finalement dit qu'il voulait rompre et elle a compris que cela signifiait qu'elle serait probablement éliminée de son testament.

L'argent est une drogue terrible. La plupart des gens n'ont aucune idée de qui était Pamela... Peut-être qu'elle pensait que Jim lui faisait perdre son temps.

Quand elle a réussi à couvrir ce crime, elle ne pensait qu'à récupérer le pognon que Jim lui avait laissé. Cependant, une fois qu'elle a eu l'argent et qu'elle était rassasiée de sexe, de drogue, de fringues, elle s'est rendu compte que cela ne la rendait pas heureuse et elle s'est sentie de plus en plus coupable de l'avoir tué et elle a mis fin à ses jours comme une princesse rock'n'roll... "



13. Version Erwann Meriadec (fils des proprios d'un restaurant rue Beautreillis dans lequel Morrison venait souvent mangé):

Dans le Nouvel Observateur en 2014, il écrit:

"C'est du délire de la part de Mme Faithfull. Il est bien mort dans sa baignoire, rue Beautreillis. On le sait, nous avions le restaurant en face de son appartement, La Bergerie, où il déjeunait plusieurs fois par semaine et Pamela Courson est venue avertir ma mère, propriétaire du resto à l'époque. Nous n'avons jamais vu Morrison "stone". Il sortait beaucoup et c'était devenu une figure locale des boîtes autour de la République et de la Bastille. Calme et détendu. il jouait avec mes deux filles de 2 et 1 an. Jamais on ne l'aurait laissé faire s'il y avait eu un doute."

Attendons d'avoir plus de détails sur ce témoignage plus qu'étonnant auquel j'accorde assez peu de crédit. Sauf sur le fait qu'il est tout à fait possible que Jim jouait avec les enfants.




Les soupçons concernant Pamela Courson

En lisant certains témoignages (Agnès Varda, Tere Tereba, Randy Ralston), on se rend compte qu'à des degrés divers ces personnes impliquent Pamela Courson dans le décès de Jim. Pour Agnès Varda, Pamela n'a pas pris soin de Jim comme la situation l'exigeait, cette opinion est partagée par Tere Tereba lorsqu'elle dit que Jim n'était pas le principal souci de Pamela et surtout Randy Ralston qui certifie que Pamela lui a avoué être responsable de la mort...

Ce rôle de Pamela Courson, qui involontairement ou volontairement causerait la mort de Jim, est un sujet hautement sensible. Lorsqu'Oliver Stone prépare son film "the Doors" il doit signer un contrat avec la famille Courson par lequel il s'engage à ne pas impliquer Pamela dans la mort de Jim...

Pourtant légataire unique de la fortune de Jim, elle ne touche rien et c'est finalement une décision de justice qui en fait l'unique héritière. Mais les doors la menace d'une nouvelle action en justice suite à un litige financier. Elle décède le 25 avril 1974 d'une overdose d'héroïne par injection. Elle avait demandé que ses cendres soient déposées sur la tombe de Jim mais ce souhait ne sera pas respecté.





Conclusion:

Mourir jeune semble avoir été une certitude pour Jim. En 1965, dans le quartier de Venice à Los Angeles, alors qu'il discute avec Ray Manzarek de leur projet de fonder un groupe, il confesse que sa vie sera courte. Il ne donne pas de précisions et Ray ne lui demande pas de détails.

En 1970, alors que Janis Joplin et Jimi Hendrix viennent de décéder, Jim annonce à ses amis qu'ils sont en train de boire avec le no 3 !... Il a 26 ans et il a la certitude que sa mort est imminente.

Morrison souffre d'asthme comme le révèle son ami Lisciandro et prend un médicament appelé Marax qui va être interdit aux Etats-Unis parce que lorsqu'il est suivi d'une prise d'alcool il peut être mortel. Pamela elle-même avait confié que l'asthme dont Jim souffrait se combinait à des problèmes cardiaques. Il pourrait s'agir d'une cardiopathie rhumatismale.

Quelques mois avant son départ pour Paris, Jim se blesse au dos à l'hôtel Château Marmont à Los Angeles. Alors qu'il voulait rentrer dans sa chambre par la fenêtre en se balançant à une corniche, il tombe d'une hauteur de plusieurs mètres...

Après son arrivée en Europe, alors qu’il est à Londres, il perd connaissance. (Une perte de connaissance et non pas une overdose est une option avancée par certaines personnes pour expliquer ce qui se serait passer au Rock'n'roll circus.)

Peu après son arrivée à Paris, alors qu'il loge à l'Hôtel avec Pamela, celle-ci doit appeler en urgence un médecin la nuit parce que Jim a des problèmes pour respirer. Toujours dans cet hôtel, Jim tombe du 2ème étage et évite de s'écraser parce que sa chute est amortie par le toit d'une voiture.

Et il est toujours alcoolique malgré ses efforts pour limiter sa consommation. A Paris, il est seul. C'est une des raisons pour laquelle il demande à Alain Ronay de le rejoindre. Sa santé mentale s'est détériorée. Hervé Muller, qui ne l'a rencontré que 4 fois, témoigne de la détresse et de la paranoïa qui habitent Jim.


La thèse du suicide n'est pas à écarter.

S'enfermer dans la salle de bain pour empêcher qu'on lui porte rapidement secours signifierait qu'il veut mettre fin à une situation existentielle devenue insupportable. Ce geste suicidaire est une option tout à fait envisageable même si cela est choquant et difficilement acceptable pour bon nombre de fans.

Toujours dans le sens d'un suicide, la probabilité que Morrison ait volontairement consommer de l'héroïne cette nuit-là reste aussi une hypothèse sérieuse. Outre le témoignage d'Alain Ronay qui parle d'une overdose, on a retrouvé dans ses carnets la phrase "les dealers chinois auront ma peau". (une partie du pavot utilisé par la French connection provenait en partie d'Asie du sud-est).

De plus, il a soudainement pris la décision le 1 juillet de demander que sa carte de crédit soit mise au nom de Pamela et lui. Sachant que Pamela dépendait financièrement de lui, on peut interpréter ce geste comme une précaution qu'il prend pour ne pas laisser Pamela démunie, sachant que sa fin (planifiée ?) est proche.

La prise volontaire d'héroïne aurait été alors l'élément décisif pour abréger ses souffrances.

Car la mort semble avoir été vue par Morrison comme une délivrance comme en témoigne cette terrible confession qu'il fait en 1970: "Quand la mort survient, il n' y a plus de souffrance. Je la vois comme une amie".

Une ancienne amante, la journaliste Patricia Kennealy, confirme cette morbide déclaration lorsqu'elle dit: "On ne peut pas sauver quelqu'un malgré lui et Jim ne voulait pas être sauvé...."
Ce message a été modifé par Sister Mid'nite (4 Sep 2021, 12:05)Citer
Nico


23 Aoû 2014, 10:08
Excellent résumé qui met en avant les nombreuses incohérences de certaines versions ou témoignages.
Citer
marcdoors


28 Aoû 2014, 7:57
C'est vrai que c'est hallucinant les contradictions de Bernett. Dans le docu de France 2, les derniers jours de Morisson, visible sur Youtube (c'est dans la partie 4), Bernett affirme qu'il est arrivé dans les toilettes après qu'on ait embarqué le corps. il n'est même pas question de barbu / pas barbu dans cette version, puisqu'il dit ne pas avoir vu le corps !!!!!! Il a un applomb terrible dans ce docu, tout en donnant une autre version que dans ses bouquins.
A mon sens, rien que cette contradiction (je l'ai vu / je l'ai pas vu dans les toilettes) décrédibilise complètement cet individu.
Citer
Antoine


28 Aoû 2014, 8:25
Et sa ressemblance beaucoup trop troublante avec Roland Magdane
Citer
Sister Mid'nite


29 Aoû 2014, 2:07
Il était plus à sa place comme vice-président de Disneyland Paris en charge de Disney Village que comme conteur des derniers jours de Jim Morrison.
Citer
john silence


29 Aoû 2014, 11:26
Antoine , c'est vraiment pas sympa pour Roland Magdane !
Citer
Sister Mid'nite


30 Aoû 2014, 9:07
Doublon
Ce message a été modifé par Sister Mid'nite (29 Nov 2017, 12:52)Citer
marcdoors


1 Sep 2014, 13:01
C'est pas nouveau cette histoire de Roger Stephens, ça traine dans plein de bouquins et il témoigne également dans le docu de France 2 d'il y a quelques années.
Le seul truc nouveau, par contre, c'est ce gars du bar en face qui témoigne. Je me suis fait la remarque, il parle de ses enfants qui étaient petits à l'époque, ce qu'il fait qu'il doit être né à peu près comme Jim, soit entre 40 et 45.Du coup, il doit avoir dans les 70 ans.
Ce serait intéressant de lui parler, de le rencontrer.
Il continue à parler sur le site du Nouvel Obs ?
Citer
Nico


1 Sep 2014, 13:08
Le Nouvel Obs ne veut pas donner ses coordonnées...
Citer
Miami 69


1 Sep 2014, 14:06
Je ne connaissais pas cette histoire de Steffens. Dans les grandes lignes Faithfull confirme aujourd'hui ce que De Breteuil avait dit en 71.

Si l'histoire de De Breteuil et Faithfull est la vraie (mais il faudrait connaître ce qui s'est passé avant le téléphone de Courson à De Breteuil) je trouve que Varda s'est fait manipulée par Courson et à sa place je l'aurai mauvaise.

Détail troublant. Bernett affirme que Jim est décédé dans un cabinet de toilette fermé à clé et Pamela lance un SOS parce Jim est dans la salle de bain fermée à clé.
Ce message a été modifé par Miami 69 (1 Sep 2014, 14:11)Citer
Sister Mid'nite


3 Sep 2014, 5:53
mauvaise manip
Ce message a été modifé par Sister Mid'nite (12 Sep 2014, 9:09)Citer
Sister Mid'nite


3 Sep 2014, 5:53
Citation de Miami 69 :


Détail troublant. Bernett affirme que Jim est décédé dans un cabinet de toilette fermé à clé et Pamela lance un SOS parce Jim est dans la salle de bain fermée à clé.


"I must find a place to hide,
A place for me to hide "

The soft parade
Citer
Gérard Depardoors


3 Sep 2014, 11:39
Super ton récap' de la mort de Morrissone
Finalement, c'est la première fois qu'on arrive vraiment à me captiver sur ce sujet assez dérisoire!
Citer
marcdoors


5 Sep 2014, 13:00
C'est quand même dingue qu'avec tous les moyens de communication modernes, on ne puisse pas rentrer en contact avec ce Erwann et lui proposer, pour les parisiens, une rencontre. Il a apparemment des choses sympas à raconter sur Jim.
Citer
birdofpray


7 Sep 2014, 7:13
Citation de Sister Mid'nite :
Citation de Miami 69 :


Détail troublant. Bernett affirme que Jim est décédé dans un cabinet de toilette fermé à clé et Pamela lance un SOS parce Jim est dans la salle de bain fermée à clé.


"I must find a place to hide,
A place for me to hide "

The soft parade

"I see the bathroom is clear
I’m sure that someone is following me"

LA Woman

En fait Jim étant s’est levé en pleine nuit car il n’arrivait pas à dormir. Il décide de nettoyer la salle de bain de fond en comble. Il ferme la porte à clé derrière lui. On le retrouve le lendemain matin dans la baignoire avec des gants en caoutchouc, asphyxié par le white-spirit car il avait oublié d’ouvrir la fenêtre pour aérer la pièce. La mort s’ensuivie.
Citer
Sister Mid'nite


8 Sep 2014, 12:25
Voici en intégralité le récit très détaillé qu'un témoin de premier plan, Alain Ronay, a donné en 1991.

Des extraits de ce texte ont été publiés par Paris Match en avril 1991 à l'occasion de la sortie du film The doors d'Oliver Stone.

Pour rappel, Alain Ronay, est un photographe français naturalisé américain, qui avait rencontré pour la première fois Jim à l'UCLA en 1964 et il s'était lié d'amitié avec le futur leader des doors.

Il raconte en détail ce qu'il a vu et entendu les 2 et 3 juillet. Il a remarqué l'étrange comportement de Pamela Courson, l'incompétence du médecin et la police qui a essayé de cacher la mort du chanteur américain.


Il se souvient de l'état angoissé de Jim, son envie d'entreprendre une cure de désintoxication et sa volonté de ne pas consommer d'héroïne.


Son récit est très long et donc je l'ai décomposé en 3 parties.

Voici le premier épisode.


"Le vendredi 2 juillet, Jim et moi nous nous sommes promenés et avons discuté dans le quartier du Marais à Paris. Jim devait rencontrer un professeur de yoga et je devais servir d'interprète à leur discussion qui a eu pour thème "l'homme qui s'avance vers la mort comme un funambule" et aussi les points de vue de Friedrich Nietzche sur le suicide.

Jim était obsédé par la mort. C'était connu de beaucoup de personne mais il avait rarement abordé ce sujet avec moi. Ce matin-là, il a parlé de ce sujet plusieurs fois. J'ai réussi à le sortir de ses idées noires en lui parlant d'Oscar Wilde. Nous n'étions ni l'un ni l'autre particulièrement intéressés par cet écrivain anglais mais de parler de Wilde nous a permis d'élever notre esprit.

Un mois plus tôt, Jim et Pamela étaient venus à Londres et je leur avais réservé une chambre à l'hôtel Cardogan. Je leur disais que c'était là que Wilde fut arrêté.

Je me suis alors souvenu que Jim et Pam avaient séjourné à Paris dans un hôtel qui s'appelait L'Hôtel. Je dis donc à Jim : " Tu réalises qu'Oscar Wilde a aussi vécu dans cet hôtel ?" Jim ne répondit pas. Je rajoutais "Fais attention à ne pas le suivre de trop près car tu pourrais finir comme lui". Jim ne répondit toujours pas. Mes remarques étaient déplacées et je me sentis stupide.

Heureusement nous sommes arrivés devant une espèce de magasin à moitié vide qui s'appelait La Voix d'Orphée. Nous n'arrivions pas à savoir ce que c'était mais cela intéressait Jim qui m'a demandé de me renseigner. Lorsque nous avons appris que c'était un studio d'enregistrement, Jim est devenu de bonne humeur.

"Hey ! C'est presque un bon présage, n'est-ce pas ?" dit-il "Je pourrais finir d'enregistrer ma poésie ici. C'est ce que je vais faire. Je ne veux pas quitter Paris. Je suis heureux ici. Je devrais faire venir mes enregistrements que j'ai laissé au studio Village recorder si les bootleggers ne s'en sont pas déjà emparés."

Après nous nous sommes engagés dans la rue des Rosiers, une rue pleine de couleur avec des gens d'origine très diverses. Tandis que Jim achetait un pendentif pour Pamela, j'ai remarqué qu'il essayait de paraître heureux alors qu'il ne l'était pas du tout. Il y avait beaucoup d'angoisse dans son comportement. Je le connaissais suffisamment pour le percevoir. Il y avait quelque chose d'anormal et de faux dans ce comportement.

Il essayait de prendre son temps et trouvait des excuses pour que je reste avec lui, ce qui était tout à fait incroyable car Jim ne faisait jamais ce genre de demande. En fait il était désespéré, je m'en suis clairement aperçu. Mais pourquoi ? Je ne le lui ai pas demandé. Il ne me l'aurait pas expliqué. Par le passé, Jim arrivait à contrôler ses angoisses.

Vers midi, son agitation s'exprima à travers une violente crise de hoquets. Nous avons mangé dans un restaurant alsacien dans un décor Art déco. Puis dans l'après-midi nous avons découvert une boutique qui vendait des films rares parmi lesquels des oeuvres du cinéaste Fritz Lang. Après nous sommes passés chez le cordonnier auquel Jim avait donné ses bottes pour qu'il les élargissent. Mais il ne les avait pas fini.

A plusieurs reprises, Jim a de nouveau eu des crises de hoquet qui secouaient tout son corps très violemment. Il devint de plus en plus agité. Il était secoué de spasmes nerveux et je n'en connaissais pas les causes.

Cet état a connu son paroxysme dans l'appartement rue Beautreillis à 17h30 quand je devais le quitter pour rejoindre Agnés Varda. "Ne pars pas" implora-t-il. Il y avait quelque chose d'anormal dans cette situation. Il tentait par tous les moyens de me retenir. Il était désespéré. Mais pourquoi ? Il a d'abord voulu que je lise un article du magazine Newsweek. Il était très sérieux mais moi j'étais déjà en train de partir. Il m'a suivi dans les escaliers et cela a pris au moins 30 minutes jusqu'à ce que nous arrivâmes à la porte d'entrée de l'immeuble. Il voulait que je l'aide à envoyer un télégramme depuis le bureau de poste du quartier. Ensuite il m'a demandé s' il pouvait rester dehors avec moi. A la place de la Bastille, il m'a proposé de boire une bière avec lui. Il répétait "Reste s'il te plait, ne me laisse pas !…Fais-le pour un vieil ami". Il continuait d'être secoué par des crises de hoquets.

Nous avons commandé et j'ai demandé au serveur de se dépêcher. A ce moment Jim a fermé les yeux alors qu'il avait toujours ses crises de hoquet. Il se concentrait pour essayer de s'en débarrasser. Je l'ai regardé et j'ai eu la sensation très claire de voir le masque de la mort sur son visage. Cette sensation a disparu quand Jim a ouvert les yeux. Il m'a regardé et m'a demandé: "Qu'as-tu vu ?" "Rien… Jim, rien…" répondis-je.

Nous avons commandé une deuxième bière et je me suis rendu compte qu'il était temps que je parte. Je lui ai dit "Pardonne-moi mais je dois vraiment y aller". Je suis parti rapidement et je me suis arrêté à l'entrée du métro. Je me suis retourné pour le voir. Il a senti que je l'observais, il s'est tourné et m'a regardé fixement durant quelques secondes. Ensuite j'ai couru en bas des escaliers.

J'étais désemparé par ce qui se passait. Le mois précédent, il était heureux et calme. Paris était une bonne chose pour lui. Il n'avait plus à supporter tous les inconvénients liés au statut de star. Il consacrait beaucoup de temps à l'écriture et faisait de longues balades anonymement dans Paris. Il buvait moins et ne se droguait pas.

Vivre tous les jours avec Pamela n'était pas dans ses habitudes. A Paris, Pamela était très indépendante et vivait très peu avec lui. Donc presque tous les jours du mois de juin je les ai passé avec Jim. C'était très calme et ce sont les meilleurs moments que j'ai passé avec lui. Il m'avait invité à le rejoindre à Paris pour revivre "les bons vieux jours". Il s'était promis d'abandonner sa vie de rock star et son pari tenait. Venir à Paris avait pour but d'en finir avec l'alcool et d'apaiser l'angoisse que son statut de star avait fait naître. Au mois de juin, il avait été très créatif dans le domaine de la poésie.



Dans son bureau, Agnès Varda me regarde et dit:

"Alors, il t'a semblé voir le visage d'un mort ?"

"Pas un visage, ce que j'ai vu était un masque mortuaire".

Agnès regardait distraitement son courrier.

Je cherchais à percer ses pensées pour savoir si elle était indifférente ou si elle ne croyait pas ce que je disais ou si elle parviendrait à me donner une explication qui apaiserait mon angoisse.

"Dois-je continuer ?"

"Bien sûr" répondit-elle tout en gardant sa main sur le courrier et me regardant dans les yeux.

"Qu'entends-tu par masque '" me demanda-t-elle ?

"J'entends le masque mortuaire que l'on fait sur le visage des gens décédés. Quand nous étions étudiant, Jim avait un livre sur Francis Bacon et dans ce livre il y avait une photo du masque mortuaire de William Blake".

"Ah ! maintenant je comprends. C'est curieux…"

"Curieux ? Tu pourrais utiliser un autre terme. Moi quand je l'ai vu, ça m'a rendu malade !"

"Je vois que cela t'a fortement impressionné !"

"Jim savait que j'avais rendez-vous avec toi mais il a insisté pour que je reste avec lui. J'ai demandé à Pam d'aller avec lui voir le film avec Robert Mitchum.

Agnès m'a souri et a dit:

"Si tu veux on ne va pas au restaurant vietnamien. Va les rejoindre. De toute façon je suis fatiguée et je dois revoir le texte de Tango (Le dernier tango à Paris ndlr)".

"Je ne veux pas y retourner. Allons manger aux Sept Epices !"

Agnès a fermé les volets, éteinds la TV puis elle m'a demandé: " A-t-il pu se débarrasser de ses problèmes de hoquet ?"

"Non pas du tout !"


Tôt le lendemain matin, alors que je me reposais après une nuit d'insomnie, je me suis levé en ayant l'impression que le téléphone sonnait. Comme j'étais invité dans l'appartement d'Agnès Varda, je n'ai pas répondu. Mais je voulais en avoir le coeur net et je me suis dirigé vers la salle de séjour où il y avait un téléphone. Ce devait être 6h du matin. Je suis retourné au lit très tendu parce que je ne savais pas si le téléphone avait sonné.

Quand j'ai été réveillé pour la deuxième fois, j'ai bien entendu la sonnerie du téléphone. À l'extérieur, il y avait les sons typiques du marché. J'ai entendu le bruit du courrier qui tombait à travers la fente de la porte. Cela signifiait qu'il était 8 heures. Le courrier arrivait toujours ponctuellement.

J'ai décroché le téléphone et c'était la professeur de yoga, Monique Godard. C'était une grande femme nerveuse qui fumait énormément, portait toujours des jupes très courtes et aurait pu être mannequin. Elle avait des capacités de guérisseuses reconnues qui lui avaient amené des clients illustres. Elle avait de l'influence sur eux. Bien que j'avais de sérieux doutes quant à ses pouvoirs, je l'avais contacté en espérant qu'elle accepterait Pam comme patiente.

"Je quitte Paris et je ne serai pas de retour avant que vous ne retourniez en Californie," m'a-t-elle expliqué. "Si votre ami a besoin de mon aide, il doit d'abord voir un docteur. Je veux qu'il ait un contrôle. Vous pouvez le lui dire. Se drogue-t-il ? A-t-il des problèmes circulatoires ? Je dois tout connaître."

"Mais ? je ne me suis pas mis en contact avec vous pour Jim mais pour Pamela. Je pensais que je m'étais fait comprendre. L'autre jour, elle était en très mauvaise forme."

"Qui ? elle ? Je ne la prendrais jamais. Mais votre ami, je veux qu'il voie un docteur immédiatement. Je sens ces choses. Cela pourrait même être trop tard. Maintenant je dois y aller."

"Attendez ! Est-ce que vous me cacher quelque chose ? Par hasard avez-vous aussi appelé auparavant ? Non ? J'ai pensé que cela aurait pu être vous. Devez-vous raccrocher ?"

"Prenez soin de Jim !... Je ne serai plus à Paris et depuis hier je suis inquiète pour lui. Merci."

"Bon voyage !"

Je n'ai pas su quoi faire. J'étais à court d'idées.

Quelques minutes plus tard le téléphone a de nouveau sonné. C'était Pamela. D'habitude, elle parlait avec une voix très douce, mais cette fois on sentait la crainte.

"Peux-tu parler un peu plus fort ?"

"Jim est inconscient, il saigne. Appelle une ambulance. Tu sais, je ne parle pas français. Dépêche-toi." Pam pleurait et elle a ajouté "Je pense qu'il meurt…"

Je me suis directement dirigé vers la chambre d'Agnès, j'ai frappé et elle s'est réveillée. Je ne savais pas utiliser le système téléphonique de Paris et j'ai demandé à Agnès de le faire pour moi. Elle a pris son téléphone et m'a demandé l'adresse de l'appartement où se trouvait Jim.

"En attendant, écris un message pour l'employée de maison et Bernardo (Bertolucci) pour les avertir que j'ai dû sortir pour un cas d'urgence."

Agnès a composé le numéro plusieurs fois et je lui ai demandé ce qui se passait. Elle m'a dit "Du calme, on n'est pas aux USA ici. Ca prend du temps. Prends ton passeport tu vas en avoir besoin".

J'ai demandé à Agnès de ne pas donner le nom de Jim, seulement le numéro de l'immeuble et le nom de la rue et je suis revenu en courant à ma chambre. Quand je suis retourné vers Agnès, elle disait au téléphone: "Elle est américaine. Elle ne parle pas le français. Envoyez quelqu'un qui parle l'anglais au troisième étage, la porte à droite."

Dans mon esprit j'étais déjà en chemin. Je tremblais et pissais de peur dans mes pantalons. Pam avait toujours une inclination pour le drame, mais je pensais que cette fois ce serait différent.

Le trafic était à l'arrêt près de l'Ile de la Cité, où quelques étudiants manifestaient. Ils ont profité de la situation pour expliquer les raisons de leur manifestation aux automobilistes.

Agnès a réussi à trouver un espace entre deux bus pour passer avec son vieux Volkswagen et en un éclair nous sommes arrivés sur la rive droite. Elle a dépassé toutes les voitures en zigzaguant dans le trafic, perdant seulement du temps dans les petites rues à sens unique autour de la Bastille. Je n'ai pas pu me retenir de lui demander, si à son avis les hoquets persistants pouvaient être le signe d'une mort imminente ?

"Où as-tu entendu cela ?" me répondit-elle ?

"Mon père me l'a dit quand il en a eu à l'hôpital"

"Non...ne panique pas"

"Hé bien il est mort quelques heures plus tard et je n'ai jamais découvert si c'était une coïncidence ou non. Je n'y ai pas pensé hier. Si seulement je l'avait fait."

Nous avons vu l'ambulance devant l'immeuble et les passants venaient pour suivre le drame. Un fonctionnaire retenait la foule et nous a escortés à l'entrée.

J'ai demandé "Comment va-t-il ?"

"Vous devez demander en haut."

Je me suis remémoré une scène qui s'était passée la semaine précédente. Jim avait déposé un paquet de bois de chauffage qu'il portait (nous venions d'acheter du bois pour la cheminée). Il était sorti pour s'aérer et ne pouvait pas reprendre son souffle. Il avait besoin du bois de chauffage pour avoir chaud en juin ! "Mais tu te sens bien ?" lui avais-je demandé. "Regarde-moi, je suis dix ans plus vieux que toi et pas exactement en grosse forme, mais je ne suis pas essouflé."

La porte du troisième étage était grand ouverte. J'ai vu Pamela debout toute seule au bout du couloir d'entrée, mais je ne pouvais pas voir trop bien à cause d'un groupe de fonctionnaires. Ils se sont écartés quand j'ai essayé d'atteindre Pamela qui m'a dit:

"Mon Jim est mort, Alain, il nous a quittés, il est mort."

Elle a ajouté, "je veux être seule maintenant, je te prie de me laisser tranquille".

Je ne savais pas où aller, donc je l'ai attendue. J'étais dans une impasse. Abasourdi. Je regardais autour de moi pour essayer de me concentrer sur quelque chose. J'ai vu les bottes de Jim qui étaient dans la chambre. La botte de gauche était légèrement avancée comme quand on marche. J'ai eu l'impression d'un déjà vu, comme si les années que j'avais passé avec Jim, l'acteur dramatique, m'avait préparé à vivre ce moment.
Merci de m'avoir préparer à vivre cela Jim, cela m'a été d'une grande aide.

Fuck you Jim.

Agnès était debout à l'entrée demandant au fonctionnaire responsable s'il était vraiment sûr que Jim était mort. Il a courtoisement répondu qu'ils n'avaient rien pu faire pour lui et qu'ils étaient arrivés une heure trop tard.
Pam est entrée dans la chambre et j'ai demandé à Agnès de rester avec elle. "Sais-tu où sont ses vêtements ? Elle est tout humide" m'a demandé Agnès quelques minutes plus tard. Je lui ai montré le cabinet près de l'entrée. Je lui ai chuchoté, "Ne leur dis pas qui tu es et qui Jim était. Laisse-moi parler. S'ils découvrent que tu es cinéaste ils pourraient devenir soupçonneux. Nous devons faire passer Jim pour un citoyen américain normal."

"Mais penses-tu sérieusement qu'ils savent qui je suis ? Crois-moi, ils ne savent pas ce que je fais."

"Tu es passée à la TV récemment. Agnès Varda est sur le point de devenir un nom très familier à tout le monde !"

"N'exagère pas !" a conclu Agnès en retournant vers Pam.


J'ai entendu dire qu'ils m'ont défini comme un ami américain. Un inspecteur de police venait pour découvrir comment Jim avait été trouvé dans la baignoire. Il se rapprochait de la chambre à coucher.


J'ai décidé de ne plus écouter les détails des conversations pour essayer d'éliminer les informations qui rendaient cette mort réelle.

L'inspecteur de police s'est approché de moi et m'a dit :"La concierge m'a dit que vous avez vécu ici plus d'un mois et que vous aussi êtes américain."

J'ai répondu que depuis quelques jours je vivais chez une autre personne.

"Comment se fait-il que vous parlez si bien le français ?" m'a demandé l'inspecteur sur un ton soupçonneux.

"Parce que je suis né à Paris, mais je suis un citoyen américain naturalisé."

"Donnez-moi des précisions sur votre ami et aussi sur sa petite amie, la nationalité, la profession, je voudrais savoir s'ils consommaient de la drogue."

L'inspecteur le découvrirait de toute façon quand le médecin légiste arriverait. Il a demandé à l'auxiliaire médical de remplir un rapport complet. Pendant ce temps j'ai eu une idée: inverser les deux prénoms de Jim brouillerait les pistes. Pour l'instant c'est tout ce que je pouvais faire.

"Le nom de mon ami était Douglas James Morrison. Il était américain et poète." J'ai attendu qu'il ait fini d'écrire et j'ai ajouté "Il était alcoolique mais ne consommait pas de drogues."
Ce message a été modifé par Sister Mid'nite (12 Sep 2014, 11:02)Citer
Sister Mid'nite


9 Sep 2014, 12:24
Même si la mort de Jim avait été décrite par le médecin légiste comme celle d'un jeune Américain trouvé mort dans sa baignoire, les journaux auraient de toute façon rapporté l'événement. Et même si les prénoms de Jim n'avaient pas été inversés, il y aurait eu des lecteurs assez perspicaces pour déchiffrer la vraie identité du décédé. Sa présence à Paris n'était pas secrète.

"D'habitude les poètes n'ont pas un style de vie luxueux, Monsieur," me fait remarqué l'inspecteur. "Comment pouvait-il se permettre de vivre dans un appartement comme celui-ci ?"

"Vous voyez, il était poète, mais il avait beaucoup d'autres affaires."

"Allons voyons, Victor Hugo naissait avec une barbe blanche et Rimbaud n'en n'avait pas quand il est mort."

Je me suis exclamé "Pouvons-nous nous arrêter un instant, tout cela me rend malade. J'aimerais rejoindre mes amis."

"C'est tout pour le moment. Si le médecin légiste fait un rapport satisfaisant, nous pourrons publier un acte de décès et un permis d'inhumation. Autrement d'autres docteurs seront appelés pour travailler sur ce cas."

"Combien d'autres ?"

"Beaucoup."

Sur la porte de la chambre où reposait Jim, il y avait un panneau sur lequel était écrit en arabe et en français "Je dors, ne pas déranger". Je me décidais finalement à entrouvrir cette porte même si je ne voulais pas voir le cadavre de Jim. Je voulais garder l'image de lui à la Bastille.

A ce moment-là, le dernier policier a quitté la chambre, laissant la porte ouverte. J'ai ainsi pu voir son pied. Cette dernière vue, triste, a remplacé le souvenir du café à la Bastille.

Pam restait à côté de moi et tenait mon bras. Elle portait une djellaba blanche, souvenir de leur dernier voyage au Maroc. Ce vêtement lui donnait l'apparence d'un fantôme.

"Leur as-tu donné le vrai nom de Jim ?" lui ai-je demandé.

"Non "

Je lui dis que j'avais inversé les prénoms. J'avais mis Douglas d'abord, puis James. Cela brouillerait les pistes pendant un certain temps.



"Dis-moi comment il est mort. Nous ne serons plus seuls longtemps."

En déchirant méthodiquement les broderies de soie sur sa manche, Pam a commencé à raconter l'histoire.

"L'autre nuit, nous sommes rentrés directement à l'appartement après le film. A peine arrivé, nous avons sniffé de l'héroïne et Jim a écouté ses chansons. Il les a toutes écoutées, l'une après l'autre, même The end. Puis nous sommes allés nous coucher. Jim m'a demandé de lui redonner de la poudre, c'est ainsi qu'il en a pris beaucoup plus que moi, d'autant qu'il en avait déjà pris seul durant la journée. Nous en avions pris aussi la nuit d'avant."

"Qui l'avait ? toi Pamela ?" a demandé Agnès

"Oui bien sûr, c'est moi qui la garde."

Pam a dit ces mots sur un ton qui sonnait faux. Elle a reparlé normalement quand elle s'est tournée vers moi et a dit "Alain, tu ne l'as pas encore vu. Mon Jim est si beau. Va le voir, va. "

"Et ensuite, qu'est-ce qui est arrivé ?" ai-je demandé, ignorant sa suggestion.

"Nous nous sommes endormis. Je ne sais pas quelle heure il était quand la respiration de Jim m'a réveillée. Il était toujours endormi, mais le pauvre gars avait des problèmes pour respirer. J'ai essayé de le réveiller mais il n'a pas réagi. J'ai pris peur et j'ai commencé à crier et à le frapper. Je l'ai frappé durement une fois, deux fois, trois fois, il ne réagissait pas. Je l'ai giflé deux ou trois fois. Alors il s'est réveillé. J'étais dans un état de fatigue profond mais j'ai réussi à l'entraîner jusqu'à à la baignoire."

Le thé qui chauffait était prêt et Agnès a servi une tasse à Pamela. "C'est une camomille. Elle te fera du bien."

J'ai observé la petite gorgée de Pam avant de lui demander "Qui a ouvert le robinet de la baignoire ?"

"Je ne m'en souviens pas. Je me suis réveillée plus tard en sueur. Jim n'était pas dans le lit avec moi. Je l'ai trouvé dans la baignoire, inconscient. Il avait ces marques rouges sur le côté de sa poitrine. Soudainement, il a commencé à vomir dans la baignoire. Alors, j'ai couru à la cuisine pour chercher une bassine. Je suis retournée. Il vomissait et j'ai vu des morceaux d'ananas que nous avions mangé pour le dîner et aussi du sang. J'ai dû vider et laver la bassine trois fois. La troisième fois j'ai remarqué un caillot de sang. J'étais dans un tel état de fatigue qu'il m'a dit d'aller me coucher."


Puis Pam nous raconte sa conversation avec le médecin légiste.

"Que pouvez-vous me dire ? Qu'il n'a pas même fumé de la marijuana, même à Los Angeles où les joints sont aussi communs que les cigarettes ?"

"C'est seulement hier soir que…"

"Soudainement, j'ai arrêté de parler. J'étais à bout de nerfs. Je ne pouvais même plus penser" nous explique Pamela.

"Je suis désolé" lui a dit le docteur "je ne peux pas signer le certificat indiquant une mort naturelle."

Agnès caressait sa main et lui a dit que les auxiliaires médicaux avaient dit que Jim était mort au moins une heure avant leur arrivée.

Pam n'a pas répondu. Elle continuait à déchirer sa manche puis s'est remise à raconter.

"Il avait une expression si sereine. Sa tête reposait en arrière et l'eau montait jusqu'à sa poitrine. Il souriait légèrement. Si il n'y avait pas eu tout ce sang..."

"Tu sais que saigner à mort est complètement indolore" l'interrompit Agnès "Il ne pouvait pas savoir ce qui lui arrivait."

Le téléphone a sonné. Mais, avant que Pam ne l'aie saisi, Agnès l'a avertie qu'il pouvait être sur écoute. Donc, toutes nos conversations devaient être faite à partie d'un téléphone public.



A ce moment, je me suis demandé si cela pouvait être le jeune comte avec qui Pam s'était enfuie au début de l'année laissant Jim à Los Angeles. Pam ne l'avait jamais nommé directement devant moi. Chaque fois qu'elle voyait ses amis parisiens, Jim et moi nous nous retirions jusqu'à ce qu'ils soient tous partis. Nous n'en avons jamais parlé et peu à peu je suis devenu convaincu que Jim ne s'en souciait pas vraiment.

Son attitude était en accord avec le conseil qu'il m'avait donné. Il m'avait dit de ne pas m'inquiéter si Pam menaçait de se suicider.

En y repensant, tout cela me fait frissoner.

Il avait fait un effort délibéré pour s'éloigner de Pamela et, paraphrasant une phrase qu'il avait dite à un de ses concerts (à Chicago durant le morceau When the music's over), il m'avait dit:

"Il y a seulement deux choix que l'on peut faire. Chacun d'entre nous l'a fait. Toi et moi sommes du côté de la vie et elle, du côté de la mort. Ni toi ni moi ne pouvons faire quelque chose à ce sujet. Ne te fais pas de souci pour elle."

(Je répondais) "Mais Pam a menacé de remplir la maison jusqu'au plafond avec de l'héroïne (en provenance de la French connexion à Marseille). L'a-t-elle vraiment fait ? Où pourrait-elle obtenir de l'argent ? Du comte ? Dis-moi."

"J'e t'ai dit d'oublier ce bordel. Assez. Je le fais."



Je suis sorti m'acheter des cigarettes et en revenant vers l'immeuble j'ai traversé la petite foule de personnes qui attendait dans la rue. J'ai entendu les mots "jeune" "mort" et "étranger". Je n'ai pas entendu le nom de Jim ni sa profession. Pour l'instant le secret était bien gardé.

En remontant vers l'appartement, j'ai vu deux jeunes dont les visages m'étaient vaguement familiers. Je ne les ai pas aimés dès que je les ai vu. Je n'aimai pas les personnes qui n'avait pas jeté des pavés aux CRS en mai 68 et ils étaient exactement le genre de type qui ne l'avait pas fait.

J'avais à peine fermé la porte derrière moi que les deux types ont sonné. Le grand s'est présenté comme Jean, le petit comme Jean-Louis. Ils ont demandé à voir Pam. Je leur ai expliqué que Pam ne pouvait voir personne et je leur ai conseillé de l'appeler le jour suivant.

"Ecoute, je suis celui qui téléphonait" dit Jean agressivement. "Je connais tout. Vraiment tout."

Alors que je restais silencieux, quelques notes de piano montaient depuis la cour. Je me suis senti comme sur scène dans une pièce de théâtre, exactement au moment où l'on baisse précipitamment le rideau sous les huées du public. A ce moment, Agnès est apparue deus ex machina. Pour appuyer sa demande, Jean a immédiatement dit "J'ai vécu avec Pam pendant six mois."

Fidèle à sa réputation, Agnès a répondu du tac au tac "D'accord, mais maintenant vous devez partir."

Elle les aurait jetés tout de suite si Pam n'était pas intervenue en appelant Jean, lui disant d'entrer. Pam et Jean s'étaient assis sur le lit sur lequel j'avais dormi quand je vivais là et bavardaient tranquillement ensemble.

J'ai frappé à la porte et j'ai dit nerveusement "Partez s'il vous plaît. Vous ne devez pas être ici quand le médecin légiste arrivera avec la police."

En partant, il nous a dit "S'il vous plait ne dites rien à personne. Faites-le pour Pam. Des ennuis épouvantables pourraient arriver."

Dans la cage d'escalier, Jean m'a dit qu'il partait pour Marrakech où il avait une maison. Il arrangeait tout dans le cas où Pam voulait les rejoindre. Si cela était nécessaire, il laisserait même son appartement de Londres disponible. Je lui ai promis de le garder informé des nouveaux développements.

"Je ne peux pas croire qu'elle aie des amis comme eux" dit Agnès en secouant la tête.

"Ils sont des trafiquants de drogue."

"Un comte ?"

"Pourquoi pas ? que crois-tu ? Juste parce que quelqu'un est comte il devrait être vertueux ? Tu crois que Pamela va le dire ? Je crois que c'est le cas classique de la toxicomane qui pousse son compagnon dans le même rôle."

Je n'ai pas pu répondre. Pamela nous avait rejoints.

Je lui ai demandé "Pam, as-tu laissé des substances dans l'appartement ?"

"Non, j'ai tout jeté dans les toilettes. Il n'y a plus rien."

"Agnès m'a dit que Jean de Breteuil avait trouvé une pipe de haschisch sous le tapis. S'il l'a prise avec lui nous devons être très prudents."

Le bureau de Jim était resté grand ouvert jusqu'à ce que Pam y mette tous ses papiers, y compris une pile de copies de "Une Prière américaine". Elle a inspecté la pièce, cherchant ce qui pourrait avoir un lien avec Jim. Elle tournait dans le bureau tout en me fixant avec ses yeux comme si elle avait un rayon laser. Je me suis rendu compte qu'elle pourrait m'accuser de vol. Cela n'aurait pas été une surprise considérant ce qu'elle était. Qui sait ce qu'elle était capable de faire ? Je pouvais me considérer chanceux qu'elle aie fermé le bureau devant Agnès.

Agnès restait bien présente mais je n'ai pas voulu qu'elle soit impliquée dans tout cela. Après quelques objections, elle s'est résolue à partir. Elle a dit à Pam qu'elle préparerait un lit pour elle.

Tandis que Pam quittait la pièce, je suis allé à la fenêtre. Devant l'immeuble, la foule se dispersait lentement.

J'ai remarqué une plaque avec l'inscription "Victorien Sardou" fixée sur le bâtiment opposé. Je me suis demandé s'ils accrocheraient une plaque pour lui aussi. Et comment le définirait-il ? Poète ou chanteur ? Je devrais revenir après quelques années pour le découvrir.

Je deviens dingue.
Ce message a été modifé par Sister Mid'nite (12 Sep 2014, 12:22)Citer
Nico


10 Sep 2014, 7:08
C'est l'interview qui avait été diffusé par le fan club italien que tu as retranscrit ?
Citer
jimborrison


10 Sep 2014, 8:01
King Magazine (Italy) 1991
JIM AND I FRIENDS UNTIL DEATH
by: Alain Ronay
Citer
Nico


10 Sep 2014, 9:10
C'est bien ce que je pensais. A propos de cette interview, beaucoup on dit que c'était un fake.
Citer
marcdoors


10 Sep 2014, 9:58
Citation de Nico :
C'est bien ce que je pensais. A propos de cette interview, beaucoup on dit que c'était un fake.


Ca veut dire qu'on accorde du crédit à l'interview de Paris Matche et pas à celle là ?
Citer
Miami 69


10 Sep 2014, 10:08
Citation de Nico :
C'est bien ce que je pensais. A propos de cette interview, beaucoup on dit que c'était un fake.


Je ne connaissais pas ce témoignage de Ronay mais en lisant ce texte ici pour la première fois on voit que la plupart des biographes puisent dans ce compte rendu. Plein de passage sont repris presque mot pour mot dans plein de livre.

Ronay a-t-il réagi à la publication de cet article ?
C'est juste la question qu'il faut se poser.
Citer
john silence


10 Sep 2014, 11:57
http://newdoorstalk.proboards.com/thread/1663/friends-death-king-italy-1991
Citer
john silence


10 Sep 2014, 11:59
Fake ou pas fake , je tiens ici à remercier le boulot de Sister pour sa passionnante traduction !

Cool de pouvoir lire en français cette fameuse itw !

Merci pour tous les fans ;) !
Citer
Page 1 2 3 ... 9 10 11 ... 15 16 17

Vous n'êtes pas connecté.
Perdu votre mot passe ?
Nouveau message | Nouvel utilisateur | Recherche